02 juillet 2006

Le courrier des lecteurs III

Toujours occupé par mes examens (je termine mardi), je continue à poster des choses que je n'ai pas besoin d'écrire...Aujourd'hui, c'est mon ami Olivier qui s'y colle pour un post en deux parties, nous proposant une réflexion très intéressante:

Arts premiers et mauvaise conscience

Un événement récent de l’actualité a été pour moi l’occasion de me poser un certain nombre de questions sur notre culture de manière générale, et sur l’art en particulier. Cet événement est l’ouverture du musée des « arts premiers » (aussi appelé musée du quai Branly) à Paris. Sans avoir fait de recherches approfondies, les bribes d’informations que j’ai recueillies sur les objectifs, et les présupposés théoriques, de ce musée ont éveillées mon attention.
En effet, il semblerait que la création de ce musée ait généré une controverse chez les ethnologues et anthropologues français. Le but du musée consistait, à l’origine, à présenter les œuvres « nues », c’est-à-dire sans l’accompagnement d’un discours théorique et scientifique sur leur utilité ou leur valeur symbolique. La fronde des scientifiques était basée sur la conviction résumée par Jean-Paul Barbier-Mueller dans « Le Temps » du 23 juin 2006 : « Comprendre double le plaisir des yeux ». Il semblerait que finalement un compromis ait été trouvé et que le visiteur soit introduit un minimum au sens des objets qui lui sont présentés.
Les intentions des créateurs du musée étaient pourtant louables : donner la place qu’il convient aux traditions non occidentales en considérant leurs productions comme des œuvres d’art à part entière. Il s’agissait d’en finir avec le préjugé ethnocentriste qui veut qu’on ne considère comme œuvres d’art que les peintures, les sculptures et les objets issus d’une tradition « occidentale » (à défaut d’un meilleur terme). Le corollaire de ce préjugé, selon les initiants de ce projet, consiste à ne voir dans les œuvres d’art premier que des objets de curiosité (« regarde chérie ! C’est fou ce qu’arrivaient à faire ces africains »). D’où, à ce propos, l’abandon de la dénomination « art primitif » à cause de la connotation péjorative impliquée. On peut donc s’extasier sur la beauté d’une urne funéraire de Micronésie sans être introduit à son rôle dans la société micronésienne. Tout comme il est possible de s’émerveiller devant le portrait d’un noble exécuté par un artiste de la Renaissance sans connaître le processus de mécénat qui sous-tend le tableau. L’œuvre d’art pour elle-même, quelque soit son origine. Voilà un beau projet !

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